Sommet Afrique-France : le Medef en vedette au sommet de Nice


Plus de 200 chefs d’entreprises, français et africains, sont invités au Sommet Afrique-France des Chefs d’Etats qui s’ouvre aujourd’hui à Nice. Avec, en vedette, pour la séance de clôture, Laurence Parisot, Présidente du Medef.

En plaçant ainsi le secteur privé et le patronat à l’honneur, Nicolas Sarkozy met en scène la "rupture » tant annoncée" (et jamais réalisée) des relations entre la France et l’Afrique. Alain Joyandet, secrétaire d’Etat à la Coopération, ne déclarait-il pas, en juin 2008 : "il faut renforcer l’influence de la France, ses parts de marché, ses entreprises. Ne pas avoir peur de dire aux Africains qu’on veut les aider, mais qu’on veut aussi que cela nous rapporte"* . Sans aucun doute, un groupe comme Total, qui réalise près de 33% de sa production en Afrique et a distribué en 2008 plus de 5 milliards d’€euros de dividendes, démontre chaque jour que "cela rapporte" plus aux actionnaires qu’aux salariés, français ou africains.

Main sur le cœur, ou sur la poche du portefeuille, les chefs d’entreprises présents à Nice vont adopter une nouvelle "charte de l’entrepreneur en Afrique" sur la responsabilité sociale et environnementale (RSE). De beaux discours, une fois de plus. Mais les pratiques des entreprises françaises sur le continent africain sont souvent bien différentes. Peut-on parler de "responsabilité sociale" quand des groupes français en Tunisie s’opposent à la création d’organisations syndicales dans leurs entreprises ? Quand le groupe Bolloré, leader en Afrique du transport et de la logistique, licencie les délégués syndicaux de Camrail, sa filiale ferroviaire au Cameroun, ou les militants du port d’Abidjan ? Total au Congo ou au Nigeria, AREVA au Niger ou au Gabon, la Compagnie fruitière au Cameroun,… : les atteintes à l’environnement et les conditions de travail scandaleuses font régulièrement la "une" de la presse africaine et, parfois, internationale…

Sauf à se réduire à un simple exercice de relations publiques, la responsabilité sociale et environnementale des entreprises ne peut seulement reposer sur les démarches volontaires et non contraignantes. Nul ne peut se déclarer "socialement" ou "environnementalement" responsable, en ayant choisi ses propres normes, règles et objectifs, sans contrôle social et institutionnel de la mise en œuvre des engagements pris.

L’enjeu de la RSE est de progresser dans l’élaboration de normes sociales et environnementales qui soient contraignantes. Le Medef s’y oppose vigoureusement et cette question n’est pas à l’ordre du jour du sommet Afrique-France de Nice. La CGT a donc décidé de ne pas y participer. S’engager sur ce terrain, mener le débat sur la régulation publique des investissements étrangers, sur les politiques nationales de développement de l’emploi décent, sur les coûts économiques et sociaux des incitations fiscales, sur la responsabilité des entreprises donneuses d’ordres vis-à-vis des pratiques de leurs filiales, sous-traitants et fournisseurs, aurait pourtant, parmi d’autres sujets, constitué une vraie "rupture" dans les relations entre la France et l’Afrique.

* Libération, 24 juin 2008.

Article mis en ligne le 31 mai 2010 par Laurent



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